Rénover
Palais des sports, Saint-Étienne (Loire)

> Descriptif opération


Diminuer la matière mise en œuvre, réduire les délais de construction à quelques heures, limiter la pénibilité des chantiers : le milieu du XXe siècle valorise cette trilogie. Les dômes géodésiques auto-stables résultant des travaux de Richard Buckminster Fuller concrétisent cette démarche. Mais, s’ils frappent les esprits à travers des projets prospectifs de couverture de Manhattan ou de la Sibérie, ils ne connaissent qu’un nombre limité de réalisations concrètes dont le Pavillon de la biosphère de l’Exposition universelle de Montréal en 1967, de 80 mètres de diamètre, et celle de Bâton Rouge, de 113 mètres de diamètre. En France, un architecte réputé pour ses réalisations de sièges de banques et d’ensemble de bureaux, Pierre Dufau s’empare de ce procédé constructif pour réaliser deux palais des sports, l’un célébré, celui de la Porte de Versailles à Paris, l’autre moins médiatisé, celui de la Plaine Achille à Saint-Étienne. Contrairement à celui de Paris, « un édifice célibataire », le dôme stéphanois constitue la figure de proue d’un équipement comportant deux autres bâtiments, également signés par Pierre Dufau. Depuis une vingtaine d’années, cet ensemble original cherche sa vocation, en relation avec la création d’équipements tels le Zénith, l’évolution du quartier, le transfert de structures telle la Comédie de Saint-Étienne. Au cours de ces années de réflexion, la valeur patrimoniale de l’édifice n’a cessé de s’affirmer.

Descriptif de l’opération

Dès la fin des années 1950, la croissance démographique stéphanoise plaide pour que soit réalisé un équipement majeur. Mais, sans doute après avoir visité ceux récemment réalisés à Tours, à Mulhouse et à Lyon-Gerland qui regroupent au sein d’une même enveloppe un vaste éventail de pratiques sportives, la Ville décide de construire deux édifices distincts. Elle les place sous le signe commun de la polyvalence : une salle omnisport ouverte « à d’autres formes de manifestations » et un complexe sportif « permettant la pratique simultanée de plusieurs sports ». Fin avril 1961 s’opère un double choix : celui du site, le parc des expositions de la plaine Achille où une surface de 12 000 m2 annuellement occupée par la fête foraine est libre, et celui de l’architecte, Pierre Dufau. Honoré du titre de Grand Prix de Rome, celui-ci est déjà en charge des îlots insalubres en centre-ville et de la construction du lycée technique de garçons.

Il attribue une forme spécifique à chacun des deux éléments du programme et les relie par un bâtiment bas. Il conçoit le complexe sportif (72 x 50 m soit 3 600 m2) à partir d’une charpente en bois lamellé-collé définissant une toiture en anse de panier, ce qui l’apparente à de nombreuses salles de sports réalisées en France au cours de cette même décennie. En revanche, il reprend pour la salle omnisports, rapidement baptisée le Palais des Sports, la solution très originale du dôme géodésique qu’il a adoptée pour édifier le Palais des Sports de la Porte de Versailles à Paris.

Ainsi que le détaille Bernard Marrey dans « Le guide Rhône-Alpes de l’architecture du XXe siècle » conçu à l’initiative de l’Union régionale des CAUE Rhône-Alpes, « le principe d’un tel dôme repose sur la juxtaposition de 1100 panneaux d’aluminium de 23/10e millimètre d’épaisseur, découpés en losange, cintrés par pliage, et renforcés par une entretoise en tube d’aluminium. Rivetés à froid sur le chantier, ces panneaux sont assemblés au sol en commençant par le sommet,  un mat de levage central élevant la coupole au fur et à mesure du montage ». D’un diamètre de 61 m. pour un poids de seulement 45 tonnes, cette coupole « Kaiser », couvre 3 000 m2. Elle repose sur cinq arcs de béton portés par des poteaux en bétons en forme de Y de hauteur variable. Elle reçoit une isolation thermique intérieure par projection de laine minérale et constitue le point d’accroche de l’ensemble des éléments nécessaire aux activités qui s’y déroulent.

Intérêt

Plusieurs dimensions se conjuguent pour justifier l’intérêt qui mérite d’être porté à cet édifice. Il constitue incontestablement un élément remarquable du volet « lieux de sports » du patrimoine de l’architecture française du XXe siècle. Il témoigne de la présence constante de grandes signatures nationales dans l’évolution de l’architecture stéphanoise des XXe et XXIe siècles, dont notamment, à cette époque, Louis Arretche, Bernard-Henri Zehrfuss et André Wogenscky. Il illustre la quête permanente d’une évolution innovante des formes, des matières et de leur mise en œuvre pour traduire les aspirations profondes de chaque période, propos qui est au cœur de la Cité du design.

Il relie Saint-Etienne à un ensemble internationales de constructions géodésiques, individuelles ou publiques, notamment associées à la biosphère, aux végétaux, à l’espace…  Il se rattache enfin à ces passerelles croisées jetées par-dessus l’Atlantique par des architectes et des ingénieurs pour révolutionner les structures des constructions et des ouvrages d’art et plus particulièrement par l’américain Richard Buckminster Fuller et par le français Robert Le Ricolais.

Caractéristiques de l’existant

La coupole géodésique abrite un espace central de 38 x 25 m, qu’entourent des gradins en partie fixes (édifiés en béton) et en partie mobiles (réalisés en bois) permettant d’accueillir de 3 600 à 3 900 spectateurs selon les configurations. En périphérie une galerie met en relation les trois entrées principales avec une douzaine d’accès aux gradins.

Interventions

Si la couverture en aluminium n’a subi aucune altération au cours du demi-siècle écoulé depuis sa construction, des travaux lourds de rénovation et de modernisation sont conduits en 1999 lorsque l’accent est mis sur l’accueil.

Procédure

Désaffecté depuis 2007, l’ex Palais des sports, inscrit sur la liste nationale des Architectures contemporaines remarquables, cherche sa nouvelle vocation non sans que sa démolition pure et simple ait été envisagée. Fin 2011, le Conseil municipal de Saint-Etienne, présidé par Gaël Perdriau, acte l’intention de réhabiliter en totalité le Palais des spectacles.  « L’ambition retenue est de doter la ville d’un pôle audiovisuel. » Seraient ainsi associés plusieurs programmes. Le premier concerne la création d’espaces d’enseignement dévolus à l’École de la Comédie, l’une des six écoles nationales supérieures d’art dramatique de France, installée au sein de la Comédie de Saint-Etienne, centre dramatique national. Le second propose de répondre aux besoins d’extension des locaux de la SMAC stéphanoise, le Fil, et de son exploitant, la Limace. Le troisième, le cœur sensible du projet d’évolution, concerne la conception d’un lieu adapté aux besoins des tournages cinématographiques « Art et essai » et des séries télévisuelles se déroulant dans une région que l’on estime également riche en décors naturels urbains, industriels ou paysagers… La société Angénieux, spécialisée dans les optiques, serait associée au projet.

La Ville, qui doit réaliser un investissement de 6 M€ pour conduire à bien ce projet, a sollicité une participation de l’État, via la DRAC, et de la Région Auvergne-Rhône-Alpes.

 

 

A voir/ A lire

Site Pierre Dufau : http://www.pierre-dufau.com
Site Domes Kaiser: https://about.kaiserpermanente.org
Guide de l’architecture XXe en Rhône-Alpes, B. Marrey/ URCAUE, Editions Picard

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