Rénover
Médiathèque CABA, Aurillac (Cantal)

> Descriptif opération


À proximité du centre historique de la ville d’Aurillac, la place de la Paix propose une stratification architecturale détonante : entre les masses frustes et étirées d’anciens casernements se déhanche un impénétrable complexe cinématographique, « Le Cristal », alors qu’en coin se dressent d’impavides constructions de style 1960, comme frappées de stupeur par l’exactitude de leur géométrie. Parmi celles-ci, dans le lointain d’une échappée visuelle qui les rend quelque peu mystérieuses autant qu’incertaines, quelques notes jaune pâle encadrées d’un rouge tonique transmettent au regard  la présence d’un travail faisant entrer dans le XXIe siècle un témoin local de l’architecture du XXe siècle.

 

Descriptif de l’opération

En 2007, l’agglomération d’Aurillac étudie l’évolution de sa médiathèque, un édifice combinant des murs de béton revêtus d’une pierre smillée et des façades composées de percements vitrés dont le rythme régulier est affirmé au moyen d’épais encadrements également de béton. Deux volumes saillants animent la façade principale d’un immeuble atone, dont la seule vibration optique et tactile est dévolue à la pierre qui s’empare des variations de la lumière naturelle pour  changer de texture et de teinte.

 

Intérêt
La médiathèque appartient à un ensemble de constructions illustrant une pratique architecturale fondée sur la simplicité des volumes, la répétition d’ouvertures identiques, l’emploi du béton combiné à la pierre. Dans ces constructions prennent place des équipements publics dont les Archives départementales du Cantal (Levard et Croizet, 1957), des représentations consulaires (Chambre d’agriculture du Cantal) et des établissements liés à la santé (MGEN, Harmonie Mutuelle). Si certains de ces  immeubles connaissent des évolutions de leurs aménagements intérieurs, ils conservent pratiquement intactes leurs caractéristiques architecturales initiales ce qui les fait lentement glisser vers une obsolescence esthétique. L’intervention de réhabilitation de la médiathèque est donc intéressante parce qu’elle inverse cette situation et se rattache à d’autres interventions sur des édifices publics de ce type initiées par la Communauté d’agglomération dont la reconversion de l’ancienne  piscine municipale, également présentée sur le site internet www.archi20-21.fr .

 

Caractéristiques de l’existant

Trop exigüe pour répondre à l’accroissement de son public, pour amplifier son offre et s’ouvrir à de nouveaux besoins, trop désuète dans ses aménagements et son apparence et de surcroît  énergivore, la médiathèque François Mitterrand entame son évolution au milieu des années 2005.

 

Procédure

L’Agence d’architecture Basalt est retenue pour conduire à bien une réhabilitation complète du bâtiment, incluant une extension importante en surface, une réorganisation des différents pôles structurant l’aménagement et l’intégration d’une offre multimédia large puisque étendue à l’auto-formation, notamment aux langues vivantes, ainsi que la refonte des équipements informatiques. L’ambition thermique est également forte puisque l’objectif est d’atteindre le label Bâtiment basse consommation (BBC).

 

Interventions

Extérieurement, la médiathèque subit un profond lifting. Les extensions sont affirmées sous forme de volumes adjacents carrossés de panneaux rouges en Trespa et de vitrages fumés, matériaux et coloris tranchant avec les parties initiales de l’édifice. Ces mêmes  vitrages sont repris pour habiller les volumes en saillie sur l’ex façade principale. Une vigoureuse intervention colorée recompose les façades existantes afin de les séquencer et d’inverser au profit de la maçonnerie la relation initialement établie entre la pierre et le béton. De ce fait, le déport de l’entrée de la façade principale depuis la rue du 139e Régiment d’infanterie sur l’ancien pignon établi sur la voie conduisant au jardin des Carmes, affecte peu l’image globale de l’édifice, d’autant que la nouvelle entrée est prolongée par un mobilier fixe la rendant particulièrement attractive.

Intérieurement, le nouveau dispositif d’entrée reporte l’accueil au-delà de la salle d’exposition (ouverte et à gauche) et d’un espace de bureaux (vitré et à droite), de sorte que le grand comptoir s’articule avec l’escalier monumental. Ainsi est marquée la division de l’équipement entre le multimédia, dominant au rez-de-chaussée, et le livre, installé au niveau supérieur, l’ensemble étant chapoté par des bureaux réunis au second étage et visibles dans la grande trémie ménagée au droit du grand comptoir d’accueil.

Plusieurs éléments confèrent un caractère inhabituel à ce rez-de-chaussée : les grandes banques de bois qui descendent souplement jusqu’au sol ; les sièges qui sont déclinés selon le même design ; l’ample triptyque photographique restituant la foule rassemblée pour une représentation des « Anges Gardiens », spectacle de rue donné par le Bängditos Theater lors du Festival international de théâtre de rue d’Aurillac en 2006 ;  les bacs en fil métallique ; la sonorisation qui diffuse en continu des musiques du monde. Ils contribuent à rendre avenant un espace au plafond relativement bas.

Plus ample, plus lumineux, plus feutré, le premier étage semble aussi plus conventionnel. La réception du public (avec les mêmes banques d’accueil aux formes fluides), les postes informatiques de consultation des ressources numériques (groupés en îlots), les linéaires de présentation des ouvrages (qui préservent les perspectives visuelles), le vide (l’atrium) et le clos (les salles fermées pour la formation) laissent peu de place  aux moments prolongés de lecture in situ. Les fauteuils en plastique moulé blanc, disposés deci-delà, paraissent n’être mis à la disposition du lecteur que pour lui permettre de vérifier l’intérêt réel de l’ouvrage dont sa main s’est saisie sur un rayonnage voisin…

En dix-neuf mois de travaux et un investissement total de 4 850 000 euros,  l’ex-médiathèque François Mitterrand est devenue la Médiathèque de la Communauté d’agglomération du bassin d’Aurillac (CABA). Elle offre désormais 2 900 m2 utiles notamment grâce à une extension de plus de 500 m2 le long du jardin des Carmes. Cette mutation a créé un ensemble cohérent qui s’est substitué à l’accumulation des supports successivement apparus : livres,  disques, jeux, multimédia… L’aspect invisible de cette mutation consiste en sa mise en réseau avec les médiathèques municipales de d’Arpajon-sur-Cère, de Jussac, de Naucelles,  de Saint-Paul-des-Landes. La  mise en commun de leur catalogue informatisé permet de consulter et de pouvoir emprunter n’importe quel élément  du fonds documentaire de ces cinq structures.

Néanmoins, cette adroite transformation des lieux suscite quelques observations. La salle d’exposition est peu attractive alors que son emplacement laisse supposer qu’elle constituait un élément important du programme. Le comptoir d’accueil flanque l’escalier monumental… au point de s’enrouler sous lui.  L’atrium, respiration spatiale et source lumineuse, ne parvient ni à mettre en scène la vie de la médiathèque ni à soustraire du regard les banales cloisons des bureaux qui ceinturent son niveau supérieur.

Ceci n’empêche pas que résonnent encore ici les paroles prononcés par le Préfet du Cantal lors de l’inauguration. Citant André Malraux, il a rappelé que : « Les hommes les plus humains ne font pas la révolution,  ils  font  les  bibliothèques… »

 

 

À voir / À lire

 

Maître d’ouvrage : Communauté d’agglomération du bassin d’Aurillac

Maitre d’œuvre : Basalt Architecture

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